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1782 : Pierre Thomas Nicolas Hurtaut

Manuale rhetorices

P. T. N. Hurtaut, Manuale rhetorices ad usum studiosae juventutis academicae, Exemplis tum Oratoriis, tu Poeticis, editio tertia, Paris, chez l'auteur, 1782, troisième section "De Elocutione", chapitre II "De Sermonis Dignitate", "Secundum genus Troporum, III "De Hyperbato ", p. 197-198.

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C’est une prétendue espece d’hyperbate, qui se fait quand les mots d’une phrase sont mêlés entr’eux, sans aucun égard ni à la succession de l’ordre analytique, ni aux rapports qui lient les mots entr’eux.

 

C’est le respect pour les anciens porté jusqu’à l’idolâtrie & à l’enthousiasme, qui a fait imaginer un nom honorable pour des écarts réels, plutôt que d’oser prononcer que ces grands hommes se fussent mépris. Il y a du fanatisme à les croire infaillibles, puisqu’ils sont hommes : & souvent on les compromet davantage en les louant sans mesure, qu’en les critiquant à propos.

 

Ajoutons qu’il nous arrive souvent de prendre pour confusion un ordre très-bien suivi dont la liaison nous échappe, parce que nous manquons des lumieres nécessaires ou de l’attention requise. Il y a dans l’Enéide (II. 348.) un passage regardé jusqu’ici comme une synchise très-compliquée ; & Servius auroit cru manquer à son devoir de commentateur, s’il n’en avoit pas débrouillé la construction.

Il semble, dit M. Charpentier, que ce pauvre grammairien ait donné lui-même dans une embuscade des ennemis, dont il a toutes les peines du monde à se sauver ; & je crois qu’Enée trouva plus facilement un asyle pour son pere contre la violence des Grecs, qu’il n’en a trouvé un pour son auteur contre cette importante synchise qu’il rencontre ici, c’est-à-dire une franche confusion, dont il n’a presque osé prononcer le nom en sa propre langue. (Déf. de la langue franç. disc. II. part. III. p. 269.)

On voit que M. Charpentier regarde aussi la synchise comme un véritable défaut ; mais il est persuadé que ce défaut existe dans le passage de Virgile dont il s’agit : je n’en crois rien, & il me semble avoir prouvé qu’on ne l’a point encore bien entendu, faute d’avoir bien connu les principes de l’analyse, la propriété de quelques termes latins & la véritable ponctuation de ce passage. Voyez Méthode.

 

Si donc l’analyse elle-même vient à nous démontrer la réalité de quelque synchise bien embarrassante dans un ancien, disons nettement que c’est une faute : si la confusion ne va pas au point de jetter de l’obscurité sur la phrase, disons simplement que c’est un hyperbate. Voyez Hyperbate.